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EMMILA GITANA
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22 février 2008

LUNE

Qamar

Obstinée dans le choix des couleurs
Ronde parmi les bruns, les ocres
Légère sur les flots émeraude de la canopée
Elle tourne l’étourdie
Le faste pale des écharpes d’eau en nuées livrées aux vents


Je la vois de si haut, là-haut
Transe amoureuse lovée dans mes yeux jaunes
Je la vois de si loin, perdue de froid
L’immense nuit des draps du vide entre elle et moi


Attendrie, je l’appelle
J’ai su ses noms anciens
Ses noms d’avant les mots
Ses noms de matière brute
Quand sa vie se nouait
Dans l’embrasement des roches à venir
Oeil clair déjà sur son berceau de feu


Je soufflais sans répit des mots de vent,
des mots-marées
Et le flamboiement vierge des convulsions
de son premier désir
Avait la rage des commencements
Laissait des brûlures de ferveur
À jamais gravées dans l’obscur


J’inventais ses premières syllabes
Dans l’opiniâtre parfum des magmas

Toujours elle abondait dans la couleur
Folle insouciante dans l’or des enfances secrètes
Puis grave, brunie sous le poids des matières dures


Croissant mouvant,j’ai nommé ses premiers sourires de pierre
Coulés en veines lumineuses
Diamants très purs, si durs,
Dans les gangues des boues saumâtres
Améthystes troublantes dans le clos secret
Des géodes empoussiérées


Amante lointaine étendue sur le tissu du vide
J’ai nommé un à un ses fils, ses tourments
Surgis dans la noria des premiers déluges
Fils incestueux et lourds dont l’exigence bleutée des eaux
Était la proie de mes séductions inaudibles


Amante lointaine dans les vagues consentantes de mon désir
Nourrie de l’indigo profond des gouffres
Repue dans le baiser turquoise des lagons
Amante à moi seule révélée
Chaque nuit
Rotondité du corps


Mais son regard est grave maintenant
Maintenant que les ténèbres ont recouvré le silence


Mais son regard est bleu maintenant
Adouci dans le blanc mouvant
D’une buée drapée autour de ses rêves
Il est question muette qu’aucun mot ne sait désigner
Et je l’appelle encore dans la douceur
Des mille et un noms qui la disent
Quand ses larmes se font cyclones
Le long des vallées noires de ses seins de basalte
Et rien ne bouge hormis l’écharpe souple des vents solaires
Glissée sur le silence nu de ses épaules boréales


Entends ma voix si froide,
Pâle dans le reflet de mon oeil argenté
Entends ces noms d’avant la création
Dont j’emperle tes nuits
Or natif des mots
Entends l’immuable farandole du temps
Glisser le long du sillon mémorable d’hier
Entends aussi ce nom si doux
Nom d’aujourd’hui en maintes et maintes langues
Imprononçable nom que tait le mystère de ma blancheur
Entends la marée, le désir
Pleine terre-basse terre
Fumée sauvage du chant mêlé des sphères
De la Terre à la Lune


De toi à moi
.
LEILA  ZHOUR
.

"Celui à qui l'amour a donné la vie ne mourra jamais. "
(Mohammed Hafiz)

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