JEAN DIF
Nous ne sommes qu'édifices de cendre
la mer discute la pluie les rivières font
de l'ombre aux nuages et d'un coup de crinière
voici le félin rugissant plus de feu que d'eau
est sorti de l'arche l'homme invente l'éclair
sous la neige il est écrit que la nuit a du sang
sur les dents je le vois le mien tachant les étoiles
sur le rocher survit l'ivraie au milieu de l'incendie
comme un message les troupeaux morts broutent la tourbe
au-dessus de l'homme flambe l'arbre du désir mais au-dessus
de cet arbre rien pas un nuage du souvenir peut-être autour
de ce rien en toi scellé dans les os voici qu'il n'y a là-haut
qu'une fumée et plus de signe l'arbre coupé et tout le vinaigre
au fond de la plaie as-tu cru t'affranchir d'un poids en niant
ton flot aux marées du coeur dont chaque feuille est un arbre
énorme avec un nid de feu au milieu des fourches l'arbre
qui est lion bouquet proféré par les flammes plante nuage
dans la chaleur qui s'élève et la mer comme un fauve
sans laisse qui caresse les laîches on peut dire
aussi qui lèche les carex les copeaux d'écume
d'où naissent les mouettes comme des pages
arrachées à cette forêt qui s'effrite
allons dévoreur d'ombres allume
le feu et frotte la pierre
contre la pierre sort nu
et pur de la parole
comme d'une femme
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JEAN DIF
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