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EMMILA GITANA
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31 janvier 2010

HEURE FAROUCHE

 

Sable grain par grain
irritant
lenteur qui s’étire
se déplie
engloutit

 

L’attente…
Le temps rampe, se tortille, languit, s’écrase. Attendre le cœur clos, plein de trous, de fissures et de bosses, le cœur où s’indurent les cris que nous n’avons pas osé pousser, les chutes que nous avons haïes, les nuits plus dures que l’acier.
Attendre pour se prouver peut-être qu’on existe enfin.
Malgré soi des images montent, malgré soi les torches toujours vives s’allument.

 

Ô mère pourquoi ce geste vide
cet arrondi cassant
de tes bras fermés
pourquoi ce départ si pressé?

 

Au commencement des choses, l’attente déjà. À l’instant de toute naissance, l’attente, l’hésitation, l’élan, l’exaltation dont on revient si vite parfois. Hors des eaux, hors du limon matriciel, par les fibres, attaché, en nos fils mêlés –croit-on– pour une pérennité plus que mesure humaine, on attend. On attend le geste, l’accueil, la lumière, la voix. On attend en cet étroit passage pour un temps indéfini.

 

Pourquoi mère ta plainte acide
et tes mots tortueux
et les croûtes que tu offrais
sans la mie?

 

Face à des murs toujours plus aveugles, face à des frontières dont on ignore les contours, jusqu’à l’existence même, il faut creuser une place, sa place, vaincre l’espace nu trop grand, avancer toujours en aveugle cherchant bâton ou rampe ou chien… On marche alors à contre-rythme, calquant ses pas sur d’autres plus marquants, s’essoufflant pour suivre, pour ne pas perdre, pour n’être pas perdu, oublié.

 

Les plaintes douces du vent
frôlant les feuilles
et cet infime murmurant
malgré soi
ne me berçaient pas, mère.

 

On écarte les images comme de miteux chiffons souillés de tant d’années. On refoule, on repousse, on se veut solitaire pour griffer, pour déchirer en un désespoir révolté.
Scribe de paroles englouties, scribe d’une inspiration volage, insaisissable, on attend le mot, les mots sortilèges qui frôlent et taquinent, qui surgissent et se reprennent. On engage alors un corps à corps, une lutte avec les mots à tramer sur nos chaînes, lentement, syllabe après syllabe, absurde Pénélope, absurde vanité…

 

En moi tes mots
en moi tes larmes
et toi t’éloignant
toujours plus hautaine
toujours plus absente

 

Pesante de tout ce ramassis, de ces bribes, on a soudain envie de ne plus résister, de se laisser couler. On attend que viennent les mots bourreaux, flammes, venins. On attend la force de détruire les images si vives encore dans les brumes du temps.
On est soudain tout petit, dans l’angle d’un mur, le nez collé sur la tapisserie. On attend. On est tout petit dans le silence et les larmes ne viennent pas, le fiel submerge tout. On attend, on attendait les caresses qui ne viendront pas. Pas en ce jour. Pas en cette vie.
On voudrait être ailleurs, même à tâtons, dans l’inconnu. On voudrait le clair au-dedans de soi.

.

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AGNES SCHNELL

.

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002

 

 

 

Commentaires
A
Quelle heureuse surprise ! Merci !<br /> <br /> Un petit mot pour prévenir aurait été le bienvenu... Non ? <br /> Pas grave !
Répondre
EMMILA GITANA
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