DERNIERS DELIRES AVANT INVENTAIRE...Extrait
Quand mars fut venu
funambule aux clairières du non être
j'hésitais
Minuscule fagot cellulaire
à peine lié à un souffle de vie
je m'attendais
Sans essuyer mes rêves au paillasson
des étoiles
j'ai replié la nuit
fermé l'ailleurs
sans clef, sans certitude
j'ai ouvert la vie
et le bruit est venu
Mon premier mot fut un cri sans larme
un effroi
une attente de nuits éternelles
et de soleils vagabonds
entre le sel et les herbes amères
aux encornures du vacarme
je découvrais le jour
et les frontières de la raison
Précocement, j'appris la larme
funambule
et les soubresauts de la douleur
De loin
j'imaginais une mère en rires
les frissons torsadés de l'amour
des clairs de joies sous des cascades de lune
De loin
J'imaginais l'innocence du bonheur
dans les ailleurs du monde
Déjà
à l'ombre hachurée des persiennes
je me disais : n'aie pas peur du voyage
avant de vivre tu as déjà connu la mort
J'étais l'enfant du noir espoir
l'adolescent du non espoir
Comme des larmes de mère
l'épine du devoir
enfermait ma vie
funambule du vivre
dans l'odeur du néant
je creusais l'hiver pour en extraire le soleil
j'attendais que passe le jour
je cherchais le jardin des âmes
Sur fond de mort
sur fond de guerre
j'attendais que la vie se lasse
Dans l'hiver algérien j'écoutais
Lorca
je cherchais le sens
j'attendais que les jours passent
j'attendais
je cherchais à être
On ne vit pas sans s'attendre
je m'attendais
Et si, de ce passage ici, il reste
quelque chose
je ne veux emporter que la lumière d'un rire.
Au paillasson des étoiles, j'essuierai mes peines.
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JEAN-MICHEL SANANES
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