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EMMILA GITANA
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2 juillet 2010

L'ESPRIT DE LA PAROLE...Extrait

Il ne fait pas nuit sur la terre ; l'obscurité rôde, elle erre autour du noir. Et je sais des ténèbres si absolues que toute forme y promène une lueur et y devient le pressentiment, peut-être l'aurore d'un regard.

 Ces ténèbres sont en nous. Une dévorante obscurité nous habite. Les froids du pôle sont plus près de moi que ce puant enfer où je ne pourrai pas me respirer moi-même. Aucune sonde ne mesurera ces épaisseurs : parce que mon apparence est dans un espace et mes entrailles dans un autre ; je l'ignore parce que mes yeux, ni ma voix, ni le voir, ni l'entendre ne sont dans l'un ni l'autre.

 

Il fait jour ton regard exilé de ta face
        Ne trouve pas tes yeux en s'entourant de toi
        Mais un double miroir clos sur un autre espace
        Dont l'astre le plus haut s'est éteint dans ta voix.

 

Sur un corps qui s'argente au croissant des marées
        Le jour mûrit l'oubli d'un pôle immaculé
        Et mouille à tes longs cils une étoile expirée
        De l'arc-en-ciel qu'il draine aux racines des blés.

 

Les jours que leur odeur endort sous tes flancs roses
        Se cueillent dans tes yeux qui s'ouvrent sans te voir
        Et leur aile de soie enroule à ta nuit close
        La terre où toute nuit n'est que l'œuvre d'un soir.

 

L'ombre cache un passeur d'absences embaumées
        Elle perd sur tes mains le jour qui fut tes yeux
        Et comme au creux d'un lis sa blancheur consumée
        Abîme au fil des soirs un ciel trop grand pour eux.

 

Il fait noir en moi, mais je ne suis pas cette ténèbre bien qu'assez lourd pour y sombrer un jour. Cette nuit est : on dirait qu'elle a fait mes yeux         d'aujourd'hui et me ferme à ce qu'ils voient. Couleurs bleutées de ce que je vois qu'avec ma profondeur, rouges qui m'éclairent
        mon sang, noir qui voit mon cœur...

 

Nuit du ciel, pauvre ombre éclose, tu n'es nuit que pour mes cils.

 

Bien peu de cendre a fait ce bouquet de paupières
        Et qui n'est cette cendre et ce monde effacé
        Quand ses poings de dormeur portent toute la terre
        Où l'amour ni la nuit n'ont jamais commencé.

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JOË  BOUSQUET

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