OUVREZ LE FEU...Extrait
ARRETEZ LES RIVIERES
arrêtez les rivières pour que vienne la mer
c'en est fait du retard pris sur les équinoxes
je sens grandir en moi un monde inachevé
où la vigne grandit jusqu'au sertao rouge
car je n'ai pas fini de naître
tous mes yeux sont en cendre mon sang
est noir de monde
mais j'ai ouvert le feu ma chair est insurgée
et ce n'est qu'un début
des milliers de brasiers avancent par le monde
partout la marée monte
partout les poings se lèvent
voici que toutes choses vont devenir nouvelles
ARRETEZ LES RIVIERES
ne bercez plus vos enfants morts
il est grand temps d'ouvrir les digues
à cette terre en marche dans nos rêves
ne bercez plus vos enfants morts
l'eau venait à manquer dans vos maisons
imaginaires
mais voici une terre capable de pluies justes
et puis voici qu'il neige à la pointe des blés
des chevaux gris déjà s'abreuvent dans la mer
et les moissons déferlent dans l'or
des avalanches
ARRETEZ LES RIVIERES
la colonne était vide qui marchait devant vous
mais les feux de la plaine
ouvrent au monde qui vient le chemins des eaux
libres
et ce sera la fin des évidences présentes
VOUS ! VOUS TOUS !
vous qui courbez la tête accroupis dans vos temples
sortez !
levez vos têtes millénaires
vous ne devez plus rien
votre regard est matinal
déjà les chaînes tombent de vos actes anciens
les routes insoumises ont la peau
des Communes
Il vous viendra des bras si vous prenez
les armes
et des champs de sang libre
à chaque meurtre nécessaire !
alors c'en sera fait de vivre sous la terre
et de vivre emmurés dans la paix des usines
de ses nuques ployées sur des champs
étrangers de ces mains enchaînées
au rythmes des cadences
de ces hommes couchés sur des croix
passagères
le peuple marchera sur les plus hautes routes
alors les oiseaux morts quitteront mon regard
et tous mes yeux pourront s'ouvrir
j'aurais assez de terre pour y creuser un puits
avec toutes les chances qu'on y vienne s'asseoir
et sous la cendre chaude du pain multiplié
alors je briserai les tables de la loi
j'irai en titubant sur la montagne sainte
le corps à découvert et les armes à la main
ma tête éclatera de la gloire interdite
et le torse troué de paroles futures
je verrai dans le feu les vautours s'abattre !
ce n'était donc que ça !
le feu en qui je parle ne se consume pas
mais qui m'appellera de ce buisson
de cendres ?
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TRISTAN CABRAL
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