PASSAGE DES PLUMES
Convoque si tu l'oses ton effraie, ta frayeur,
et compte lui avec patience les plumes une à une,
ne t'étonne pas que son nombre soit le même
que ceux des rêves de ton enfance,
ce sont anciennes plumes capturées aux premiers jours,
et si tu l'oses, ne génère pas l'absence ou le désespoir
en les gardant au fond de ta gibecière, encloses,
disperse-les entre l'apogée des arbres,
entre les trous des ramures et la dérobade des feuilles,
entre les minutes lucides des heures qu'on arrache,
entre la chamade folle des secondes,
ne te laisse pas distraire dans ton travail de solitude
par les nuages à l'abandon
au-dessus des branches.
Le moment viendra où tu t'apercevras
qu'il n'y a que plumes sous les plumes,
et dans cet étrange orage de duvets
ne te restera sous les mains,
entre tes doigts évidés,
qu'un néant effrayant,
une nouvelle effraie inconnue.
.
JOË FERAMI
.