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EMMILA GITANA
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26 février 2012

AU JARDIN DES COMPAGNONS DE VOYAGE

Appelle-moi.
Ta voix est bonne,
Ta voix est la chlorophylle de cette plante étrange
Qui pousse aux intimes confins de la mélancolie.

Face aux dimensions de cette ère silencieuse,
Moi, je suis plus seul que la saveur d'une mélodie dans le champ de perceptions d'une ruelle.
Viens, que je dise pour toi combien ma solitude est grande.
Mais ma solitude ne prévoyait pas l'attaque nocturne de ton volume,
Et le propre de l'amour c'est cela.

Il n'y a personne,
Viens, dérobons la vie
Et partageons-la entre deux rencontres.
Viens, qu’ensemble nous comprenions quelque chose à l'état de la pierre.
Viens, et plus vite nous apercevrons les choses.
Vois les aiguilles du jet d'eau sur le cadran du bassin :
Elles transforment le temps en poussière.
Viens te dissoudre comme un mot dans la ligne de mon silence,
Viens fondre au creux de ma main le corps luminescent de l'amour.

Réchauffe-moi
(D'ailleurs un jour, dans la steppe de Kâchân, le temps se couvrit,
Il tomba une forte pluie,
Et j'eus froid ; alors, à l’abri d'une pierre,
L'âtre du coquelicot me réchauffa.).

Dans ces venelles obscures,
Moi, j'ai peur du fruit de la multiplication du doute et de l'allumette,
J'ai peur des surfaces cimentées du siècle.
Viens et je n'aurais plus peur de ces villes dont la terre noire sert de pâture aux grues.
Ouvre-moi, porte donnant sur la chute des poires dans cette ère d'ascension de l'acier.
Endors-moi sous une branche loin de la nuit des frictions du métal.
Si l’orpailleur du gisement de matins arrive, appelle-moi !
Et, au lever d’un lilas derrière tes doigts, je m'éveillerai.
Alors
Raconte ces bombes tandis que je dormais, et qui tombèrent.
Raconte ces joues tandis que je dormais, et qui se mouillèrent.
Dis combien d'oiseaux s'envolèrent de sur la mer,
Et dans ce branle-bas des chenilles de tank passant sur un rêve d'enfant,
Au pied de quelle sensation de repos le canari fixa le fil jaune de son chant.
Dis quelle innocente marchandise pénétra dans les ports,
Quelle science découvrit la musique positive de l'odeur de la poudre,
Quelle perception de l'inconnue saveur du pain exsuda des papilles de la prophétie.

Alors moi, telle une foi chaude du feu de l'équateur,
Je t'assiérai au commencement d'un jardin.

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SOHRÂB SEPEHRI

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beatrice_lechtanski

Photographie Béatrice Lechtanski

 

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