PETITES FLEURS ANONYMES
Deux soeurs ce matin en robe blanche
ont surgi entre les herbes profondes.
le soleil s'est baigné dans leurs corolles ouvertes
éclaboussant le feuillage autour
de ses gouttes de lumière…
Les graines des xylis éclatent
dans le marécage soyeux des couleurs
leurs délicates fleurs d’or
essaiment vers leurs tiges et feuilles nues
se dispersent et nagent sur le silence
meurent à l’ombre du réel
Dans l’ombre des sous-bois
vêtues de blanc de pourpre de couleurs
par grappes ou sur des tiges grêles
parées de feuilles
ces fleurs écoutent le chant des rivières
ou dorment dans les érablières
ou groupées en ombelles
emmêlées
dans l’humidité des marais de l’été
Des petites cloches roses
rampent dans le printemps
à travers les cailloux
sur les terrains siliceux
brillent leurs feuilles luisantes
friandises pour les ours
leurs baies rouges
éclairent les rochers
D’autres s’échappent
de leurs capitules
toutes fripées et violettes
sur des tiges poilues
elles courent
enlacées par leurs feuilles
le long des routes
tout l’automne
Des petits souliers or et pourpre
s’agrippent à des lacets de feuilles
pour hanter printemps et été
trotter sur les berges des rivières
galoper le long des fossés
jouer à cache-cache
dans les forêts de conifères
Cinq pétales écarlates
au centre de feuilles droites
et de fruits globuleux
animent les platières des rivières
les graviers le sable sec
et la pierre des rochers
Des ombelles blanches
toutes petites
s’emmêlent en bouquets
dans les champs
pour fêter le printemps
Des fleurs solitaires
aux longues tiges
aux feuilles robustes
aux fruits de laine
dans les bois rocailleux
de juillet
Des épis beige et jaune
se bercent près de l’eau
sur leurs feuilles-plumes
avec de minuscules fleurs
des disques d’or
éclatent
haut ou bas
à travers de folles lances vertes
dentelées
Dans un fouillis de tiges fines
elles se balancent bleues
sur leurs feuilles étroites
dont meurent les basilaires
pour les laisser naître
les laisser folâtrer
sur les plateaux et les falaises
les rivages rocheux
Échevelées elles émergent
de capitules frangés de noir
à travers des feuilles
vaguement pennées
roses pourpres blanches
leurs couleurs bordent
les chemins oubliés
consolent les terres incultes
et près d’elles parfois :
le roc silencieux
écoute le chant d'un ruisseau
qui court dans ses veines
brise le silence des arbres
dont les branches se penchent
pour respirer la fraîcheur de l'eau
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PAULE DOYON
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