En cette journée où la lumière
exulte soulevant au-dessus de sa tête les bouleaux blancs les pins les érables les sapins et les aulnes
en cette journée où les cratères solaires rient aux éclats et se font entendre de tout l’univers
les tarins des pins te sifflent amour de ma vie
les mésanges à tête noire atterrissent dans ta paume où des graines attendent de combler leur appétit
les carouges à épaulette te font de l’œil
les parulines te saluent en hochant de la queue
les chardonnerets ont entrepris la toile de tes vêtements utilisant la palette à leur portée des nuances de jaune de noir et de blanc
alors que le vent à ton passage en perd ses directions et souffle de manière à te voir de tous les côtés
ne sachant pas où donner de la tête maintenant que tu es à proximité des battures de l’Isle-aux-Coudres
un couple de bruants lapons ayant quitté la toundra jouent pour toi à haut vol de leurs ailes
le mâle ayant posé sur sa tête une calotte noire qui a plu à la belle
et le héron posé sur l’étoc d’un rocher prend son envol ramant de toute l’envergure de ses ailes pour te prendre à son bord
les grèbes huppés ont mis leur collerette rousse pour ton attention
la happer et ayant plongé réapparaissent tout près de toi en posant contre tes seins leur poitrine
s’accompagnant de l’instrument de musique de leur parade leurs caquètements rauques et saccadés si sonores t’ayant déjà entourée d’un nid spatial et fluvial où il te sera bon de plonger
comme une sirène contemporaine mon amour
je me transformerais en moitié-femme-homme et en moitié-poisson pour leur royaume d’eaux
et de terre leur royaume corporel et sensitif mieux les connaître en l’apprivoisement des différences
je me métamorphoserais en femme-lionne
en femme-cheval
en homme-abeille
en femme-univers
en homme-rhinocéros
et en femme-fourmi
passant de l’infiniment grand à l’infiniment petit
comme je sais dilater les membranes de l’instant cette journée où la lumière exulte durera très longtemps
et parmi une bande de arlequins plongeurs arborant tel le personnage de la commedia dell’arte leurs couleurs
ma robe blanche rouge et noire je porterai et d’une similaire te vêtirai
elles auront un profond décolleté puis pour chasser les temps de tristesse qui nous ont blessées
nous monterons toutes deux sur la scène de nous-mêmes afin avec la salle tout entière à tout bout de champ nous esclaffer
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MARIE CHOLETTE
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Oeuvre Joan Miro