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EMMILA GITANA
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20 juillet 2012

LE SEUIL, LE SABLE Poésies complètes 1943-1988...Extrait

Qui dirait encore, de cette île, qu'elle est une île et de ce " il " qu'il est une pensée ?

Qui dirait, ne ressassant que cela, qu' " il " et " île " sont une seule pensée au sein du vide où elle persiste; tantôt figée dans son désir - mais c'est l'espace qui, autour d'elle, s'anime -; tantôt ivre d'errance - mais dans un univers immobile.

Ce qui demeure fuit. Et à aucun moment ne refuse: ni l'attente, ni l'aventure;

ni d'être double,

ni d'être solitude du double

et multitude de solitudes.

(...)

Disant davantage - ne se livrant pas. Une pensée à ce point partagée qu'au plus frêle de sa précarité, elle cesse d'être double.

Ne disant rien que sa négation.

(...)

Cette blancheur d'un autre soi-même, plus blanche encore où elle s'écrit.

Mots extrêmes.

L'espace ah ! l'espace infranchissable.

Qui dirait, aveugle et, aussi, émerveillé, la séparation alors qu'elle est univers préservé dans sa plénitude ?

(...)

Là où la douleur est seule et l'amour, ses propres ailes brûlées.

Disant l'immémoriale attente; en vain la perpétuant où il n'y a plus de cris qu'intérieurs.

 

Et puis cette " île " au plus lointain de l'exil où

l'onde n'est qu'ample rumeur indocile;

que mots ivres, sans objet, se heurtant à

leurs lettres défuntes.

 

Poussières de sel.

D'autres déserts sont en vue.

 

Ronde est la terre à force de tourner sur elle-même.

Le vide qui l'a modelée, la voulant ainsi.

La rondeur est fruit de la patience.

Toutes les traces cédant  la courbe.

Bel arc-en-ciel !

 

Serons-nous toujours ce bond et cette chute

où le nom s'ouvre au nom qui l'habite;

où la couleur s'ouvre à la couleur et se consume ?

Le vide après l'incendie.

 

Et puis cette errance toujours reconduite.

Et ce besoin urgent, pathétique d'en finir.

(...)

 

Feinte liberté ! L'errant, dans sa dépendance à la route, ne témoigne que de ses chaînes.

De cette solitude qui parle à soi-même pour rejoindre la solitude de l'autre,

la parole est le pas et l'ancre.

Un moment de distraction aura suffit à noyer les cinq continents.

La mer est sans remords.

Le dilemme et l'épi.

Le champ n'est jamais que sol meurtri d'une innombrable naissance.

Un voyage, vous dis-je, un éternel voyage dans l'inconnu et dans la mort.

L'âme est plus vaste que le monde.

Nous sommes cette déchirure.

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EDMOND JABES

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namibie2

 

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