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EMMILA GITANA
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21 avril 2013

PLAIDOYER POUR UNE ENFANCE

C'est toi. C'est moi, c'est nous peut-être ce plein, ce rond, ce sourire qui fond sur les joues et illumine l'instant. Ce corps sans réticence, moelleux.
Je ferme les yeux et je nous parle. Nous dont le coeur vieillit à force de savoir et de vouloir, à force d'escalader un devenir. A force de spéculation. A force de détourner la subtile logique de l'univers.
Nous qui tranchons des réponses. Nous qui administrons la vie. Nous tous enfin qu'on nomme adultes et qui depuis l'enfance n'en finissons pas de trébucher.
Mais nous sommes sourds, bornés le plus souvent. La raison ne fait que ligoter nos peurs et nos folies.
Nous fabriquons une raison comme d'autres organisent un match. La raison du plus fort qui casse la spontanéité, qui décapite l'instant, le souffle.
A coups de systèmes, de credos, d'avidité, nous pilonnons le ciel la terre les mers et notre enfance. Nous barbouillons le rire, le rêve, les bonheurs. Nous ossifions le vif de la vie.
Partout nous traquons le naturel pour le dénaturer.
Quand nous étions enfants, nous savions pourtant jouer gravement au présent et puis quitter le jeu et l'effacer sur l'ardoise magique.
Pourquoi sommes nous tellement jaloux de nos existences, de nos conquêtes, tellement agrippés à notre image ? Est-ce que par hasard nous aurions commis une faute qu'il nous faille sans cesse nous justifier et prouver notre réalité ?
Peut-être bien que nous sommes tous coupables d'enfance et nous écartons cette nostalgie comme un mal à enfouir. On nous l'a assez répété cette petite phrase vindicative : "Tu n'es plus un enfant !", ce qui signifie en clair : tu ne peux plus aimer, sentir, agir comme un enfant, spontanément, librement selon tes élans. Tu dois réfléchir avant de parler, d'aimer, de donner, de sourire. Avant.
Or plus "le coeur" réfléchit, plus il épuise le sentiment, l'intuition, plus il tarit la source.
Toute contrainte génère sa violence, éteint le jaillissement, cette innocence primordiale qui nous relie à l'autre, à soi, qui englobe.
Mais qui donc est cet autre ? N'est-il pas un reflet de nous même, pétri de la même substance. L'accueillir, c'est jouer à se démultiplier, c'est s'agrandir.
Qui a dressé la muraille entre l'enfance et l'âge de raison ? Qui nous a expulsés? Quoi nous alourdit, le savoir, la conscience, la responsabilité? Pourquoi la pénitence ?
Qu'avons-nous fait de ce corps doué d'enfance qui osait respirer danser sans méthode ni projet. Ce corps d'argile réceptif à la lumière, aux caresses, gourmand de vie, présent.
L'expérience nous raidit. Ne pourrait-elle au contraire nous apprendre à sauvegarder l'enfance, à préserver ses traces comme un repaire, une plénitude possible. La maturité de notre enfance. Alors, retournons y à ce jardin d'enfance comme on revient à une mémoire essentielle. Comme on revient dans son pays natal pour s'ancrer et se bonifier.
L'état d'enfance contient le mystère qui nous habite. Ce don de vie énigmatique, cet éclat sans pourquoi. Il est. Il s'impose, il provoque. Alors, consciemment ou pas nous le refoulons pour mieux nous protéger de son insolence, de sa pétulance et de sa liberté.
L'état d'enfance crée le jaillissement, l'imprévisible, comme le poème, comme le vent.
Capter l'enfance en nous, c'est retrouver la source, accepter d'être ce vivant confiant devant l'inconnu. C'est épouser l'instant.
Et pourquoi ne pas rêver d'une pédagogie amoureuse Une pédagogie du bonheur, de la saveur et du désir.
Plus la science nous laisse entrevoir la complexité du monde, plus la création du bonheur apparaît comme une urgence, un territoire à conquérir.
Si nous perdons le goût, si nous négligeons l'instant, comment saurons nous lutter pour échapper au désastre qui gronde ? Comment résisterons nous à la confusion ?
Aimer l'enfance dans toutes ses manifestations, c'est peut-être notre chance et notre avenir.
Envisager les plus infimes battements de vie qui s'offrent au quotidien comme autant de signes susceptibles d'engendrer une harmonie.
Organiser le choeur de la planète ou bien précipiter son meurtre ? Là se situe sans doute notre choix.
Considérer qu'en chacun de nous est nichée une enfance qui a voix au chapitre.

 

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MARIANNE AURICOSTE

 

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MILOU5

 

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