MONSIEUR FRANCOIS
...Couvert d'une indétronable casquette en tweed d'où s'échappaient quelques bouquets de cheveux, un mégot enfoui dans l'importante moustache grise, il était vêtu d'un gilet noir sur une chemise chaude , d'un pantalon confortable en grosse toile bleu, cassant sur des chaussures montantes en vieux cuir entretenu. Il semblait avoir été posé là, dans son fauteuil depuis toujours , et pour toujours. Cet homme ne quittait jamais un couteau "0pinel" avec lequel il sculptait de petits objets en bois, tout autant tranchait le saucisson, se taillait un beau morceau de pain de campagne , coupait de la ficelle (il en avait toujours dans sa poche ,en Provence c'est incontournable !!! ), s'en servait aussi de fourchette, puis à l'occasion de cure-dents ou se nettoyait les ongles. Lorsqu'il le repliait, après l'avoir essuyé entre le pouce et l'index très abimés , il le plaçait au plus profond de sa poche, pour être sûr de ne pas le perdre, tirait la montre de sa giletière , regardait l'heure, rabattait son couvre-chef sur le nez et s'endormait un moment... le mégot scellé dans la moustache. Il devait certainement avoir une bouche, mais invisible derrière ce balai de poils drus. Ses yeux s'abritaient sous d'épais sourcils en bataille " pas rangée", et même, de petites touffes "poilantes" sortaient de ses oreilles. Un drôle de spécimen !
Impossible de savoir si cet homme pensait, il parlait bas et rarement, et avait dû naitre ainsi, avec son "0pinel" pour animer ses mains. Rien d'autre ne semblait avoir d'intérêt pour lui que ses petites pièces de bois qu'il transformait du bout de son couteau, en une barque, un petit animal, un personnage. Les enfants, curieux et admiratifs, auraient bien voulu posséder une de ses sculptures, mais ne se risquaient pas à demander. Ils l'observaient .
Puis un jour, à côté de leur assiette, chacun découvrait le petit cadeau en bois qui leur était finalement destiné, en toute humilité...
Merci.... Monsieur François !!
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JOSIANE
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