FEUILLES D'HERBE...Extrait
Qui es-tu donc, ai-je demandé à l'averse tombant doucement,
Laquelle, étrange à dire, m'a répondu par les mots que je vous traduis :
Je suis le Poème de la Terre m'a dit la voix de la pluie,
Eternellement impalpable je monte de la terre, du fond insondable de la mer,
Je vais au ciel, d'où, forme vague, complètement transformée, et cependant identique,
Je descends baigner les sécheresses, les atomes, les nuages de poussière du globe,
Tout ce qui sans moi ne serait que germes latents, privés de voir le jour ;
Et sans jamais cesser, nuit comme jour, je redonne vie à ma propre origine, la purifie, lui donne sa beauté
(Car le chant qui naît à son berceau, lorsqu'il est accompli, s'en va à l'aventure,
Mais revient fidèlement, qu'il soit ou non abîmé, chez lui, avec amour).
(....)
D'or moiré, de marron de pourpre, d'argent fulgurant,
d'émeraude, de beige faon,
L'amplitude entière de la terre, le pouvoir multiforme de
la Nature consignés pour une fois aux couleurs ;
La lumière, l'air général imprégnés d'elles _ couleurs
inouïes à ce jour,
Plus de limites, de confins _ pas même le seul ciel de
l'Ouest _ mais le haut midi _ le Nord, le Sud,
Partout une pure luminosité colorée combat les ombres
silencieuses une à une.
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WALT WHITMAN
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