RETOUR A GRENADE
Reconstituer le puzzle du monde
à flanc d'abîme sur le fil tendu à se rompre du rêve
j'étais toujours ce solitaire égaré dans les foules
car je n'ai jamais connu qu'une seule nécessité : l'amour
A Marrakech j'ai vu la soldatesque du roi
battre à coups de crosses une femme d'une beauté de jasmin
Place Jemma el Fna j'attendais un signe du Destin
j'entends encore des hurlements dans mon corps de prématuré
L'aube aux reflets saumonés sur l'Hudson
c'était en juillet 1995 avant que New-York ne s'effondre
je portais le poignard de la poésie à ma ceinture
J'entendais les chutes du temps rugir entre les buildings
Je sais la lenteur voluptueuse de la lune au-dessus du Bosphore
et ce fut pendant un couvre-feu aux environs de minuit
que j'ai dansé un alphabet d'extase avec des derviches tourneurs
dans un quartier en bois de cèdre d'Istambul près du vieux cimetière.
Tant de nuits blanches à pister l'avenir à tête de cheval
à confondre des fantômes imaginaires dans des villes dépossédées
retour à Grenade pendant la semaine sainte et ses processions morbides
où dans des bars clandestins j'ai fêté avec les gitans les ors et le feu de la vraie vie
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ANDRE CHENET
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Oeuvre George Owen Wynne Apperley