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EMMILA GITANA
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18 juillet 2016

LETTRE OUVERTE A FRANCOIS HOLLANDE D'UNE INFIRMIERE NICOISE

Cher Monsieur le Président de la République Française,

 

Je suis une jeune femme née à Nice en 1988 et je vis dans cette magnifique région depuis lors. C'est une jolie ville Nice, nos loyers sont indécents, nos salaires pas bien gros mais qu'est-ce qu'on vit bien ici. On a la mer et la montagne, la pissaladière, la socca, les apéros qui commencent à 11h le matin. On sait vivre à Nice, on est heureux. Je suis infirmière de profession mais aujourd'hui je ne suis plus heureuse, je suis atterrée.
En fait, aujourd'hui, je suis triste. Triste car j'ai voté pour vous en 2012. J'ai voté pour mon parti, je suis socialiste, fière de l'être, mais honteuse de vous.

Quand va donc cesser cette mascarade? Quand allez-vous arrêter de nous mentir? Quand allez-vous prendre la mesure de vos responsabilités?
Combien de vies avez-vous sur la conscience en ce 16 juillet 2016?
Et je ne compte pas que les vies de nos concitoyens, je parle aussi de toutes les âmes civiles qui partent dans les pays orientaux où vous aimez bombarder pour nous rassurer.

Moi vous ne me rassurez pas Monsieur le Président, vous me donnez envie de vomir.

Des milliers de vies sont parties à cause de vous. On paye le prix de vos erreurs. En étant élu Chef de l'Etat je suis sûre que votre ego était fleuri de savoir que vous alliez marquer l'Histoire. En effet, vous l'aurez marquée et ce de la pire façon qu'il soit.

Nous n'avons jamais autant saigné que sous votre règne. Et oui, j'appelle ça un règne car vous en avez bien rien à faire de ce que nous, pauvres petits français, pensons, vivons, traversons.

Et lorsque l'on fait trop de bruit, que nous ne sommes vraiment pas d'accord, vous utilisez de votre toute puissance le 49.3.
Une autre de vos armes en soi.

Car oui Monsieur, vous êtes un monstre armé, dont les victimes ne sont jamais vos proches.

Je gagne 1500 euros par mois et pour ce maigre salaire, je pense avoir, ces quatre dernières années, été bien plus utile et responsable que vous. Je pense que nous autres, petites gens, tels que les policiers, instituteurs, médecins, infirmiers, pompiers et j'en passe auront bien plus marqué l'Histoire que vous, Monsieur le Président.

Moi, aujourd'hui, je ne vous écris pas une lettre remplie de détails et arguments géopolitiques car je n'ai pas la prétention de penser que je puisse vous expliquer ce que vous savez déjà. Moi je veux vous parler aujourd'hui de ce que nous, citoyens et citoyennes de France, vivons à cause de vous.

La nuit du drame, à une heure du matin, suite au plan blanc j'ai été réquisitionnée par l'hôpital. Je suis arrivée en pleine nuit et en pleine horreur, seule dans un service que j'ai réouvert pour augmenter de quinze lits la capacité d'accueil. J'ai préparé méticuleusement des médicaments, des perfusions, des pansements. Et puis j'ai attendu. J'ai attendu sans savoir ce qui m'attendait. Sans savoir quel âge ils auraient, quelles seraient leurs blessures, quelle serait ma tache. J'ai fait les cent pas, l'attente dans un silence glaçant m'a terrassée. Je n'étais pas prête pour ça mais j'étais là. Vous étiez où vous Monsieur ?

Je sors de garde Monsieur le Président, deux jours après cet attentat monstrueux commis à Nice, les enfants continuent de mourir et les rescapés envahissent les urgences pour que l'on tente de contenir leurs angoisses par des médicaments.

Avez-vous la moindre idée du travail que nous accomplissons pour réparer vos erreurs? Savez-vous qu'à Nice, le 14 juillet, un homme a perdu son épouse, ses enfants, ses parents et ses beaux parents.

Comment réparer cet homme? Qu'auriez-vous fait à sa place?

Avez-vous entendu les cris des victimes? Les avez-vous vu fuir en courant pour sauver leur peau? Les avez-vous vu s'accrocher à leur enfant puis les perdre sous ce camion? Monsieur le Président avez-vous ces cris bien inscrits dans votre cerveau lorsque vous vous couchez le soir? Vous empêcheraient-ils de dormir?

Combien de cellules de crise? Combien de manifestations? Combien de mois d'état d'urgence qui a lui aussi bien montré ses limites? Combien de morts pour que vous quittiez avec un minimum de dignité vos fonctions?

Je suis fatiguée Monsieur le Président de la République, fatiguée de votre laxisme, de vos discours à la télévision, de vos décisions. Fatiguée de pleurer les innocents. J'ai mal au dos, j'ai mal aux mains, avez-vous mal?

Je suis niçoise, je suis infirmière et je suis épuisée.

 

.

 

Matisse the-bay-of-nice-1918,

 

 

 

Commentaires
L
Quelle émotion dans cette lettre..! Madame l'Infirmière Niçoise, je voudrais soulager votre épuisement par quelques mots de réconfort...Tout en sentant bien que mes mots sont dérisoires face à votre déception et votre lassitude...<br /> <br /> Vous êtes aussi grande que votre destinataire reste petit...Et ça, ce n'est pas un mensonge, vous pouvez compter dessus..! Bien à vous et avec un profond respect.
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EMMILA GITANA
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