ODE AU ROUGE
Te dirais-je le rouge obstiné
qui hante nos nuits
dès le premier passage
le rouge cuivré des villes
sous la lumière vespérale
le rouge brique des écorces pillées
de sève et de sang mêlé
ou celui sombre matriciel
qui nous engendra ?
On se tient juste à la frontière
d’un présent fragile
on arbore le rouge des tempêtes
enfin apaisées
celui des fils emmêlés
d’une mémoire chiffonnée.
Toujours incandescente
ou presque
notre âme se repaît d’éclats solaires
de mots lucioles
qui nous tourmentent.
Parfois le rêve s’éveille de rouge coloré
garance cinabre ou alizarine
andrinople nacarat ou capucine
trop plein de passion de débordement
feu et fluide à la fois
limite ou incitation à l’avancée.
Rouge des ténèbres
qui fore chacune de nos nuits
rouge moiteur des désirs farouches
immenses en leur vertige.
Rouge brûlé des enfants tristes
rouge traces sur la peau fraîche
rouge aussi de la haine du désordre
rouge de l’ultime souffle
rouge abandon rouge brèche
insondable velours du rouge intime et caché.
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AGNES SCHNELL
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