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EMMILA GITANA
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21 août 2018

SUFFOURIYYA

En juillet 1948, le village de Muhammad Ali,  qui avait abrité des résistants, fut bombardé par l’aviation israélienne avant d’être pillonné par l’artillerie. La plupart des villageois s’enfuirent dans les wadi et les vergers des environs, dans l’espoir que l’armée de libération arabe viendrait à leur secours. . Mais l’ALA n’arriva jamais et les habitants de Saffouriyya s’égayèrent. Certains se dirigèrent vers le nord, vers le Liban, tandis que d’autres trouvaient un premier refuge, temporaire, dans les villages avoisinants de Kafr Cana et Reine. Le poète et sa famille choisirent la route du nord vers le Liban, où ils passèrent un an avant de réussir à rentrer dans ce qui était devenu Israël. Ce fut pour découvrir que l’armée ennemie avait totalement rasé leur village et que les nouvelles autorités avaient alloué aux colonies juives collectivistes (moshavim et kibboutzim) des milliers d’hectares de terres fertiles. Comme bien d’autres ex-habitants de Saffouriyya, Muhammad Ali et les siens s’installèrent à Nazareth : il ne l’a pas quittée depuis un demi-siècle.

Au cours d’une de mes visites, le poète me conduisit en voiture à ce qu’il restait de Saffouriyya, devenue Tzippori (dérivé du mot hébreu et de l’arabe dialectal, signifiant « oiseau »). A cinq kilomètres à peine au nord-ouest de Nazareth, sur une éminence boisée, entourés de vastes étendues de champs cultivés, les vestiges du village, qui s’était jadis enorgueilli de quatre mille habitants musulmans, étaient à peine visibles sous des haies de cactus et des terrasses de pierre évantrées. Tzippori est aujourd’hui un moshav – une communauté agricole juive – propère. Par la fenêtre de la voiture, Muhammad Ali indiqua en passant deux grosses pierres brisées, non loin de buissons de ronces, à l’orée du chemin d’accès d’un ranch banlieusard blanchi à la chaux : « Nous habitions ici », dit-il avant de continuer

 

 

 

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TAHA MUHAMMAD ALI

 Une migration sans fin, édition bilingue,

poèmes traduits de l’arabe (Palestine) par Antoine Jockey, éd. Galaade

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 Taha Muhammad Ali est né en 1931 dans le village de Saffouriyyaen Galilée.  A l’âge de dix-sept ans, il fut forcé d’émigrer, avec toute sa famille, au Liban, après que l’armée israélienne eut assailli son village lors de la guerre de 1948. Un an plus tard, il repassa la frontière : constatant la destruction complète de son village, il finit par s’installer à Nazareth, qu’il n’a pas quitté jusqu’à ce qu’il s’éteigne le 2 octobre 2011.

 

Taha Muhammad Ali est sans doute le plus improbable et le plus singulier des poètes palestiniens. Autodidacte et conteur, la poésie lui est venue lentement. Libre de toute convention, il s’est forgé une langue extrêmement personnelle, où se mêlent arabe classique et arabe dialectal. Si Saffouriyya, le village de son enfance, est le lieu de l’innocence d’avant la Chute et incarne la période d’avant la grande catastrophe, al-nakba, provoquée par la guerre israélienne de 1948, la dépossession, l’exil et l’acculturation s’inscrivent chez Taha Muhammad Ali dans l’expérience quotidienne, dans l’histoire, dans la terre et la langue de la Galilée, tempérés par le travail de la mémoire et de l’imaginaire.

 

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1948 palestine,

Nakba 1948 

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