L'EXIL IMMOBILE/ESILE IMMOBILE
Ce matin je ne sais pas ce qui s’est passé :
les maisons n’ont plus de fenêtres,
les arbres n’ont plus de racines,
les prairies ont abandonné
leur couleur dans la nuit,
les fleurs se sont réduites
à un simple contour en fil de fer.
La mer ne retrouve plus l’horizon
transparent dans l’espace transparent.
Des étoiles monte un filet de brume
comme de chandelles éteintes.
Le bon Dieu a avalé l’orange du ciel
et à la place de la lune, plus qu’un trou
qui conduit au cimetière des avions morts,
il fait nuit dans la nuit, noir dans le noir.
Maintenant les enfants ont des cheveux tout blancs,
plus personne qui ait encore les yeux bleus.
Mais heureusement, tu es là,
avec une boîte de crayons de couleur,
une paire de ciseaux, des petits soldats.
Voilà que la mer est repeinte, juste à temps
pour que les poissons rouges ne deviennent pas tout noirs
rongés par la mélancolie.
Le soleil, arborant bouche et moustaches,
écarquille de nouveau ses yeux dans le ciel.
Pour soutenir les arbres, à chacun d’eux tu mets
un petit soldat appuyé à son fusil.
A quoi peut bien servir un soldat pour les merles ?
Pour un merle, un simple merlon suffit :
à quoi bon gaspiller deux mots rien que pour ça ?
Avec tes ciseaux tu refais sourire les maisons.
A la fenêtre il y a même une petite fille.
Hélas, pour mieux la regarder
un sergent de bois
a laissé tomber un sapin
tout juste devant la façade.
Comme tu n’avais pas de vert,
le pré, tu l’as refait en jaune :
un pré en plein hiver, mais enfin bon :
il reverdira certainement au printemps.
.
Stamattina non so che è successo :
le case non hanno finestre,
gli alberi non hanno radici
i prati honno dimenticato
il colore nella notte,
i fiori hanno solo
un contorno di fil di ferro.
Il mare non ritrova l’orizzonte
trasparente nel cielo trasparente.
Le stelle fumano di nebbia
come candele spente.
Dio ha mangiato l’arancia del cielo
e al posto della luna c’è un buco
che porta al cimitero degli aerei morti,
è buio nel buio, nero nel nero.
I bambini hanno i capelli bianchi
non c’è più nessuno con occhi azzurri.
Per fortuna ci sei tu,
con una scatola di matite colorate
un paio di forbici e i soldatini.
Ridipinto il mare, giusto in tempo
perché i pesci rossi non diventin neri
per la malinconia.
Il sole con bocca et baffi
spalanca ancora gli occhi nel cielo.
A regger gli alberi ci metti a ognuno
un soldatino appoggiato al suo fucile.
A che serve un soldato per i merli ?
Per un merlo basta un merlo :
a che serve sciupare due parole ?
Con le forbici ridai il sorriso delle case.
Alla finestra c’è pure una bambina.
Peccato che per guardarla
un sergente di legno
ha lasciato cadere un pino
proprio davanti alla facciata.
Poiché ti mancava il verde,
il prato l’hai rifatto giallo :
un prato in pieno inverno, ma pazienza :
rinverdiderà sicuramente a primavera.
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GINA LABRIOLA
traduction Philippe Guérin
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Oeuvre Frédérick Childe Hassam