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EMMILA GITANA
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25 janvier 2025

EMILEZOLA... Extrait

 

 

Paris frissonnait sous l’étreinte glaciale d’un hiver rude, implacable. Les rues pavées du Marais luisaient d’une fine couche de givre, et un brouillard lourd, humide, semblait vouloir étouffer les derniers éclats de vie de cette ville en mouvement perpétuel. Au pied d’un réverbère vacillant, une silhouette tremblait. Ce n’était pas un homme, ni un enfant, mais un chien, un pauvre chien au pelage sale et clairsemé, qui semblait lutter contre l’abandon plus encore que contre le froid.

Ses côtes saillantes dessinaient des ombres sous sa peau tendue, et son regard, profond, implorait une aide silencieuse à chaque passant. Mais qui, en ce cœur de Paris si affairé, avait encore le temps d’entendre la souffrance d’un être sans voix ? Les chaussures claquaient sur les pavés, pressées, indifférentes. Un homme d’affaires au manteau impeccable détourna les yeux ; une femme en cape de fourrure resserra son col comme pour se protéger de la misère qui rôdait.

Ce chien n’était pas né de la rue ; cela se voyait à ses gestes maladroits, à cette manière qu’il avait de chercher dans les visages une trace de familiarité. Son museau s’agitait dans l’air glacial, traquant une odeur perdue, un parfum de foyer qu’il ne retrouverait jamais. Il avait été laissé là, sur un trottoir, un jour comme les autres, par celui qu’il aimait sans réserve. Depuis, il errait, une âme en peine, incapable de comprendre pourquoi le fil de cette fidélité sacrée avait été coupé.

Soudain, un enfant, peut-être neuf ou dix ans, s’arrêta devant lui. Ses joues rougies par le froid trahissaient l’hésitation : tendre une main vers cette pauvre bête ou répondre à l’appel impatient de sa mère, qui l’attendait à quelques mètres. Le chien leva ses yeux pleins de supplication vers le garçon, et, un instant, le monde sembla suspendu. Mais la voix de l’adulte brisa le charme : « Laisse-le, il est sale, il va te mordre. » Et l’enfant, malgré un dernier regard, s’en alla.

Le chien resta seul. Le vent s’engouffrait entre les bâtiments comme une lame, mordant la chair et l’espoir. Il finit par s’allonger contre une vitrine, à moitié dissimulé par une boîte en carton mouillée. Les lumières du bistrot d’en face dansaient sur son pelage fatigué, projetant une ombre floue, presque fantomatique. La ville continuait de vivre autour de lui, immense et indifférente, tandis que, dans ses yeux, une lueur s’éteignait doucement, comme une flamme qui s’épuise face à la nuit.

 

 

 

 

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EMILE ZOLA

 

 

 

 

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EMILE ZOLA, CHIEN, ABANDON, MISERE, LÂCHETE

 

 

 

 

 

 

 

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