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EMMILA GITANA
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27 février 2025

FRANKETIENNE ...HOMMAGE

 

 

Le grand poète Frankétienne était considéré, en Haïti, comme « une sorte de divinité » protectrice. Il est mort, ce 20 février 2025, à l’âge de 89 ans. Dany Laferrière, qui l’a bien connu, a rassemblé ses souvenirs pour lui rendre ici un magnifique hommage.

 

 

 

Frankétienne est mort. Cette nouvelle qui m’a surpris au milieu de la nuit est sûrement fausse, et ce ne serait pas la première fois. La mauvaise nouvelle cherche à nous atteindre quand on est le plus exposé à sa violence et qu’on a de la difficulté à la vérifier avec une source sûre. Je ne peux chercher la preuve de sa mort que par mes pauvres moyens. La première raison est toute simple : mon cerveau la refuse. J’ai beau lui expliquer qu’il a 89 ans et que c’est un exploit qu’il soit parvenu à un tel âge dans un pays où l’on vit un an en un jour. Dans un pays où le cœur est constamment mitraillé, même si celui de Frankétienne se régénère chaque matin. La preuve c’est ce sourire, dont on ne sait s’il est triste ou moqueur, qui flotte sur ses lèvres dans les moments les plus difficiles.

 

 

 

Son corps est celui d’un guerrier qui, malgré les blessures, retourne sur le front. En fait, il n’a jamais quitté le combat. Il se bat sur tous les fronts : la maladie, la peinture, l’écriture, la pensée, et jusqu’à la simple survie matérielle. Il a tout construit en malaxant l’imaginaire et la réalité, le rêve et l’ordinaire des choses. Seuls les enfants savent faire ça pour échapper à l’ennui qui suinte de la lente succession des jours. En effet, Frankétienne est un enfant et c’est là que réside sa force. Il est joyeux, imaginatif, buté, parfois irresponsable face aux plus graves dangers. Il a le nom le plus long de la littérature haïtienne (Jean-Pierre Basilic Dantor Franck Étienne d’Argent – je n’ai jamais su d’où venait l’argent) et aussi le plus bref : Frankétienne. Trois syllabes comme Picasso, celui avec qui il partage le plus grand nombre de traits, et surtout cette impassibilité face au temps. On devient tous un monsieur un jour, sauf Frankétienne et Picasso. On dit Picasso ou Frankétienne.

 

 

 

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La suite sur 

https://www.nouvelobs.com/bibliobs/20250222.OBS100647/franketienne-l-enfant-poete-s-en-est-alle-l-hommage-de-dany-laferriere-au-rabelais-des-caraibes.html

 

 

 

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Mûr à crever

EAN : 9782915368024
227 pages
ANA EDITIONS (13/05/2004)

 

 

 

" Haute philosophie de la lame qui tranche. Je confie mon cœur blessé à la chirurgie savante des araignées du temps. Doigts d'horloge glissant sur la toile de l'oubli. Psychiatrie empirique. Les vents nocturnes lisent avec rudesse les sentences des arbres malades de solitudes. Lecture anarchique. Ce n'est que déluge de mots pour si peu de gestes. La source ne raconte qu'aux pierres discrètes ses aventures souterraines. Le temps s'épaissit dans l'absence obscure sous les picotements de l'impatience. Les démangeaisons de l'âme en proie au désespoir. J'attends toujours quelqu'un qui ne vient jamais, ou qui revient différemment que j'y pensais. Pourtant je bénis la course des feux imaginaires. je me lave de mes larmes. Je mets ma douleur en quarantaine. Puis, je tente de rire en marge de moi.

 


Fausse liberté, le verre anéantit la révolte des poissons de l'aquarium. Moi, j'enrage contre la mémoire neutre des miroirs frivoles et la cécité des parois de verre. Je dis la puissance de mes yeux sur les lacs, sur la mer, sur les fleuves et sur toutes les régions où vit un peuple de miroirs bavards.
Nous avons vécu si longtemps dans une aire enténébrée que nous ne savons plus en quoi le rêve se distingue du réel, ni la cécité du sommeil. Nos paupières sont cousues de fil invisible. Progéniture au visage sans yeux. Ne pouvant et ne voulant rien, que valons-nous vraiment ? Il faudra que vienne la lumière, telle une immense et brutale armée de bistouris.
Battre la générale ! Sonneries. Tambours. La tempête me révèle la profondeur du coeur. La complexité de la vie.

 


Par présomption, je m'étais pris pendant longtemps pour un dieu vivant. Beau. Terrible. Je m'étais cru volontiers une force irrésistible. Fleuve viril. Lumière féconde. Vent puissant. Vague houleuse labourant la mer. Bourradant navires, épaves et corps noyés. Je m'étais cru forêt touffue. Chaîne de montagne. Batterie d'orages. Séisme irriguant, de mon sang, les veines de la terre. Avalanche de silex éclatés. flamme brûlante. Bouche dévorante. Eclair Tranchant. Amas de nuages gonflés de pluie. Avalasse irrésistible.

 


Longtemps, superbe, je m'étais cru dieu magnifique à pouvoir coucher tout seul la vie. Solitude effroyable! Je n'ai connu, à la limite, que la faiblesse et la vulnérabilité du simple mortel isolé dans l'échec. J'ai appris alors l'humilité pour éviter l'humiliation. Je m'initiai douloureusement à devenir un homme parmi les homes. J'ai souffert. Je souffre encore de vire. Mais j'accepte la vie minuscule des gouttelettes d'eau et des grains de poussière, s'ils contribuent à la croissance de l'arbre. Et aujourd'hui plus que jamais, me reconnaissant brin d'herbe fragile, je vibre au moindre bruit de pas dans un sentier ténébreux. Et mêmement frêle au frisson des étoiles, je frémis comme fleur de lune au soupçon d'une voix nocturne. "

 

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FRANKETIENNE

 

 

 

 

 

Île femme immodifiable
en son corps absolu
à volupté fluviale
au seuil de l’embouchure.
L’incendie des eaux bleues
sous la décharge des vagues
en vanité d’écumes
dans un moulin de sable
et de sel vaporeux.
Combien facile s’en va la vie
hors de nos mains fragiles.

 

 

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Les ténèbres s’éteignent
et les ombres s’effacent
au refutur de l’aube
je vais revivre l’éternité
à travers mes racines
jusqu’à ruiner l’abîme.

 

 

 

...

 

 

 


Dans l’obscure ambiguïté
Des amours angulaires
et des miroirs illusoires
l’on ne perçoit presque rien
sauf que tout change à l’instant
continûment
interminablement
et que l’œil devient sexe modifiable
selon l’envie de vivre ou de mourir
ici ailleurs maquillage de silence
et d’angoisse insoutenable
tant les mots pèsent en motifs d’émotion.

 

 

 

...

 

 

 

La distorsion du songe
la vie qui ose toujours
hausser la barre et le défi
la thématique brumeuse
des hypothèses factices
hormis l’éternité du thème
quand s’impose le dilemme
insoluble impossible
de saisir la vérité fugace
des heures qui passent.

 

 


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FRANKETIENNE

https://emmila.canalblog.com/main-tag/poesie___franketienne

 

 

 

 

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Pilier de la littérature haïtienne
Frankétienne est une figure majeure de la littérature haïtienne et francophone. Il est l’un des fondateurs du spiralisme, un mouvement littéraire et artistique qui reflète la complexité et le chaos du monde à travers un langage foisonnant, cyclique et imagé.

Œuvres et influences
Son œuvre est marquée par une langue riche, expérimentale et souvent engagée. Parmi ses livres les plus célèbres :

"Dezafi" (1975), premier roman écrit en créole haïtien, décrivant la révolte des opprimés.
"Les Affres d’un défi" (1979), une version en français de Dezafi.
"Ultravocal" (1972), un texte hybride entre poésie, prose et théâtre.
"Mûr à crever" (1968), une critique sociale et existentielle.
Il a également écrit de nombreuses pièces de théâtre, dont certaines dénoncent les injustices politiques et sociales en Haïti.

Un artiste aux multiples talents
En plus d’être écrivain, Frankétienne est un peintre et chanteur. Son art visuel reflète la même énergie tourbillonnante que ses écrits, avec des couleurs vives et un style abstrait.
 


 

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Oeuvre Frankétienne

Oeuvre Frankétienne

Frankétienne

Frankétienne

Frankétienne

Frankétienne

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