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EMMILA GITANA
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3 mai 2025

ACCUEILLIR LA MORT

 

 

 

" Voici un concept presque antinomique.
De manière générale on accueille plutôt la vie et on fuit la mort. Instinctivement.
Et pourtant même si nous résistons à l’accepter, l’une ne va pas sans l’autre.
Et nous n’avons quasiment aucun pouvoir, aucun contrôle sur l’une ou sur l’autre.
Quelqu’un qui doit naître va naître. Un peu plus tôt, un peu plus tard, avec ou sans assistance, mais quoiqu’il arrive il va naître. Quelqu’un qui doit mourir partira aussi sans que nous ne puissions rien y changer. Ou si peu.
La mort m’amène à penser au deuil et donc à ceux qui restent. 
Parce que pour celui qui est parti, il y a 2 options. Soit, nous croyons à une évolution spirituelle après la mort, auquel cas nous ne pouvons que croire que notre défunt s’est libéré d’un carcan bien lourd et lui souhaiter un beau voyage. Soit, nous pensons qu’il n’y a plus rien « après » et dans ce cas pour lui c’est la fin du film et quoiqu’il arrive il n’est plus concerné.
Occupons-nous donc des vivants. Ceux qui restent, comme on dit. Quel affreux terme quand on y pense… Comme un truc périmé qui traîne au fond de cette terre.
Que fait-on avec ceux qui restent ? On leur demande de faire leur deuil. 
Pour moi, ce n’est pas exactement ça… Il me semble bien que tout ce qu’on a vécu avec la personne qui n’est plus, est acquis. Nous l’avons vécu, c’est à nous pour toujours et il n’y a pas de deuil à faire sur ce qu’on garde.
En revanche, il y a tout ce qui aurait dû arriver après et qui n’arrivera pas. Tout ce qu’on avait projeté de vivre ensemble, les coups de téléphone, les repas partagés, les sorties, les WE, les moments de complicité… Sur tout ça, il y a un travail de deuil à faire. 
Et pourtant tout cela n’a jamais existé ailleurs que dans notre esprit, dans notre imagination. Il va donc falloir axer son deuil sur des choses qui n’ont pas été vécues et qui ne le seront pas. Donc sur le travail de notre imaginaire.
C’est une approche que je trouve intéressante et qui a apporté beaucoup d’apaisement aux gens que j’ai accompagné.
Autre point important : La souffrance. Cette souffrance brutal, violente, quelques fois soudaine, d’autres fois au long cour… Cette souffrance, on peut très inconsciemment ne pas vouloir s’en séparer. Comme si c’était le seul et dernier lien qui nous relie à notre disparu. 
Comme si lâcher cette souffrance revenait à lui lâcher la main pour de bon.
Quel gâchis. On a mis des années de vie à nourrir cette relation de petits et de grands bonheurs, de partage, de complicité, d’amour… Et tout ça pour quoi ? Pour ne garder au final que la peine et le chagrin. 
Etre heureux (même pas beaucoup, même pas longtemps) nous paraît alors impossible, presque indécent.
Pourtant si la personne décédée nous aimait autant que nous l’aimions et qu’elle revenait quelques instants sur terre pour voir comment nous nous en sortons, croyez-vous qu’elle préfèrerait nous voir assis par terre entrain de pleurer ou célébrer la vie avec reconnaissance pour tout ce qu’on a vécu et qu’on vivra encore ? 
Et si elle n’existe plus, s’il n’y a pas d’âme, pas de « suite », alors elle ne reviendra jamais et se moque totalement de ce lien de souffrance que nous arrosons chaque jour.
 Se laisser couler dans le chagrin n’est pas un cri d’amour. C’est un appel à l’aide.
Osons donc être heureux en accueillant dans nos cœurs le manque avec lequel nous allons devoir vivre et apprenons à remplir le vide abyssal que notre défunt a laissé, de souvenirs à raconter, de photos à partager, de gratitude à éprouver.
Car si ça se trouve… la mort n’est que l’âme…hors. Et alors, tout continue "

 

 

 

 

 

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SABINE MARIN

 

 

 

 

 

 

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SABINE MARIN, DEUIL, ABSENCE,VIE, MORT ,EXISTENCE, AMOUR, VIDE, COMPLICITE, RIEN

Photographie Vincia Ortoli

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