CAHIER DU NOMADE...Extrait
"Comment saura-t-il le jamais nommé
Et qui seulement dans la crainte et pour soi-même
Se demande s'il a encore un nom là-bas
Où dans un grand vide désolé
A l'air nouvellement précipité
Sans être entendu il s'évapore
Comment saura-t-il s'il habite
Ou deshabite chaque heure
Comment saura-t-il si le Temps
Qui sur son navire animé embarque
Sa cargaison complète d'aventure
Compte encore sur lui dans sa hâte
Aucune piste ici ne dénonce
Le salon voilé de la mémoire
Là tu trompes seul ton histoire
Soustrayant à la courbe de sa cataracte
Les flaques à la traîne dans l'ombre
Dans les eaux noires desquelles
Avec une autre survivance tu forges
La cérémonie infidèle dans laquelle tu te supposes
Vivant dans de clandestines durées
Où vivre alors si ce n'est dans ce volume
Qu'un regard approfondit et clarifie
Et elle le fonde autant qu'elle le rase
Cette intrépide maison
Qui s'édifie en abolissant ses murs
Abri ouvert
Où ton nom puisse entrer avec toi
Où puisse aussi s'ouvrir
La lumière qui rendra visible ta parole
Seuil d'un domicile de ton nom
Où expire ton monstre et où tu entres homme
Quand tes basses eaux danseront-elles inondées
D'un va-et-vient de regards
Qui renflouerait le Temps de ses sourdes arènes
Et échappant à la nuit du marais
Tu aéreras tes poumons et tes veines
Dans les ondes de l'espace souverain
Et aussi dans ses golfes atmosphériques
Il y aura des horizons pour des aurores
Du nom que tu supportes et que tu es
Noirceur diaphane des golfes profonds
Inondables de lumière
Où nagent nus les regards
Ah ! les golfes profonds
Dans la noirceur diaphane desquels
Respirent côte à côte ton dialecte et les mondes
Le même gouffre t'ouvre l'aventure et la maison."
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TOMAS SEGOVIA
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