A TOI MICHEL...IL EST LIBRE MAX
Veuillez excuser les fautes d'orthographes et d'accords qui se seraient glissées dans le Texte dans le vif de l'écriture d'un seul jet - Je viens les reprendre une à une pour rester encore un moment avec celles et ceux qui partagent l'absence.
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Tu as regagné le large, l'azur, les rives de l'éternité disait-on ensemble en évoquant Pascal. Demain, avec toi, je tirerai une longue bordée, éperdument blanche, une bordée déraisonnée dans le grand bleu. Nous éclabousserons comme les oiseaux l'infiniment grand qui te fascinait. Nos ailes battront, palpiteront aux souffles de ta délivrance, à l'unisson des rouleaux de Valdor et du Maroc, de la Liberté, de Rimbaud ton poète préféré.
Je t'accompagnerai, mon frère, Toi qui me reviens de cette merde et de cet escadron de chancres qui t'aura bouffé à petit feu des décennies durant. Je te serai fidèle comme un sillage, un marin pour te revoir enfin renaître au sommeil de la nuit perpétuelle, léger et serein au-dessus de ce monde qui n'a pas voulu de toi. Je ne buterai plus contre les battants d'une sordide prison, de cette géhenne, incompréhensiblement, qui te retint des siècles loin de la vie, de l'existence et de ses folies, livré à toutes les conneries et les félonies d'un cloaque qui te dépassaient, le monde paradoxal.
La cruelle maladie, cet antre terrible, l'antichambre où la mort flotte et dérive, dont tu ne seras jamais retourné, la réclusion auront eu raison de ta fougue, de ta force, de tes espérances, de l'âge tendre... La souffrance, le malheur, le mal complotaient à ton insu et ourdissaient contre toi, dressaient les murs d'une geôle dont la voûte insultait le Ciel, te privait de la lumière des justes, te brisait le souffle, à l'orée d'un bonheur à portée du fruit divin, de la force d'aimer au creux de tes mains généreuses.
Voilà pour toi, mon pauvre frère, une évocation d'un passé juché entre la joie et la tristesse. Ces mots dérisoires mais qui lentement fondent le Verbe et se jouent de l'absence, de la déliquescence. Pour Toi ces pensées qui peu à peu forgent la vérité et que la sagesse brase à chaque coucher de soleil . Nous étions si souvent tous les deux loin du mensonge, près de la source, à l'ombre de la fougère, figés vers le soleil levant, le ponant...
Et le choeur d'une chapelle abandonnée, ses profondes meurtrières engendraient la lumière d'un nouveau jour dominant la vallée, les écrins de la montagne, le chant des mélèzes. Je t'écoutais louanger le mystère près de notre Abbé Pierre - Aguesse que tu aimais, que tu vénérais mon pauvre Guide -
et quand l'aube délinéait sur le ciel les cimes altières, le regard rivé vers le Combeynot, je m'inquiétais du retour des " Grands ", des sauveteurs de la nuit partis secourir les victimes des grandes verticales de la Roche Robert, du Pic des Agneaux, de la Barre des Ecrins arrimés à l'assaut des ciels, coiffés d'un Bonnet de laine rouge à pompon Noir - Tu étais des " Grands " de mon tout petit monde...! Je t'admirais et j'étais si fier de Toi, mon frère, mon ami, mon grand pote que la maladie m'a ravi.
Écoute dans la nuit qui nous submerge, l'écho des années, nos coeurs et nos songes qui allaient de par le monde fleurir et faner ; tout cela surgit, nous appartient maintenant que tu entends, que tu vois, que tu sens et penses au-delà de ce calvaire de chair. Par devers le temps et à travers l'univers incommensurable un brin de conscience, une parcelle d'unicité étincelle dans ton regard et nous demeurerons !
Sempri, A Fianc'à Te, u mio Frateddu, pà l'Eternita, à l'Amori ...
Que l'éclat de tes yeux gravent sur le grand livre de l'humanité une page merveilleuse afin qu'en les effeuillant, comme on effane le blé, nous nous nourrissions maintenant de ta parole. L'amour ne s'abreuve-t-il pas à la vaste nuit des étoiles.
A qui parler, confesser si ce n'est au Silence, en allant à l'ombre de nos faux pas ?
Mais il est aussi des silences qui font le tour de la terre avant de gagner le ciel. Et à l'encre de la mer et de l'azur, à l'encens des nuages, les vents aux vagues chagrines ont noué nos pensers.
Comme les pétales de myrtes que le courant disperse, les mots voyagent et n'en retiennent que le sourire de la fleur éclose, ta joie d'être toujours à nos côtés, humblement, les pupilles pleines de rêves et de rivages, d'histoires emplies de nos enfances et que ton départ entonnait, balbutiait déjà ;
tu avais juste vingt ans et tu nous échappais étouffant sous un linceul de verre ...
Adieu
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CCG
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