SANS ESCLAVAGE
Ulysse dans la mer des visages
Dans la mer des écueils dans la mer de la peine
Mon frère dans le mal des épaves
La peur chantant parmi les incidents
Et mes doigts à tâtons autour de la tiédeur
J’ai rampé sur les échelles de la chair
Ulysse frère et prochain mon semblable
Entre deux cris d’oiseaux
Apprends-moi la présence parmi ceux qui se noient
Nos mains sont pleines de la rumeur des lèvres
Nos mains pleines aussi du silence qui mange entre nos yeux
Nos mains vivantes sur les ondes
Nos mains cherchant la vie sur les visages
Et la mer tend sa gueule
Et nous sommes petits
Ainsi se disséminent chaque fois les planches du bateau
Rictus clins d’œil
Le coin de l’œil pouvant tricher
Je ne sais pas si nos consciences se délabrent
Ce sont nos rides qui se croisent et notre peau s’accuse
Vieux frère apprends-moi à attendre
Apprends-moi à durer
J’ai vu un jour le monde fendu sur un sourire
Avec le ciel criant heureux des deux côtés
Mais sous le deuil tout à l’heure
La mer étant gonflée d’abîmes
Et la morale en désarroi
J’ai épelé la vie et un nom a crié
Et la lumière a ri
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GABRIELLE ALTHEN
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Photographie Philippe Pache