L'OUBLI
L’OUBLI
Tout l’amour dans une coupe
Grande comme la terre
Tout l’amour – étoiles et épines –
Je te l’ai donné, mais tu as marché
Avec tes petits pieds, avec tes talons sales
Sur le feu, et tu l’as éteint.
Ah !Grand amour, petite aimée !
Je ne me suis pas arrêté dans le combat
Non, je n’ai pas cessé d’avancer vers la vie
Vers la paix, vers le pain pour tous
Mais je t’ai levée dans mes bras
Je t’ai fondue à mes baisers
Et regardée comme jamais les yeux d’un homme
A nouveau te regarderont.
Ah ! Grand amour, petite aimée !
Mais tu n’as pas alors pris l’exacte mesure
De celui qui avait choisi, gardé pour toi
Le sang, le blé et l’eau
Et tu l’as confondu
Avec le frêle insecte tombé sur tes genoux.
Ah ! Grand amour, petite aimée
N’attends pas que je me retourne
Pour te regarder au loin
Reste avec ce que je t’ai laissé
Promène ma photo trahie
Moi, je vais poursuivre mon chemin
Qui est d’ouvrir de larges voies contre l’ombre
De rendre douce la terre
De partager l’étoile pour ceux qui arrivent.
Reste en arrière
Car la nuit est venue pour toi
L’aube peut-être
Nous permettra de nous revoir
Ah ! Grand amour, petite aimée
PABLO NERUDA