EMMILA GITANA

mardi 30 mai 2023

CHRISTIAN RUSPINI...HOMMAGE

Si le soleil revient, si le soir descend
si la nuit a un goût de nuits à venir,
si un après-midi pluvieux semble revenir
d’époques trop aimées et jamais entièrement obtenues,
je ne suis plus heureux, ni d’en jouir ni d’en souffrir ;
je ne sens plus, devant moi, la vie entière…
Pour être poètes, il faut avoir beaucoup de temps ;
des heures et des heures de solitude sont la seule
façon pour que quelque chose se forme, force,
abandon, vice, liberté, pour donner un style au chaos.
Moi je n’ai plus guère de temps : à cause de la mort
qui approche, au crépuscule de la jeunesse.
Mais à cause aussi de notre monde humain,
qui vole le pain aux pauvres et la paix aux poètes.

- Pier  Paolo Pasolini

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Parce que tu avais un grand grand coeur, du talent et de la sensibilité, je te souhaite " une longue route " parmi les étoiles ; que la terre te soit légère , Ami

 

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Comédien, metteur en scène, auteur, photographe, poète.
Il se forme à Nice avec Henri Legendre à la fin des années 80, puis avec Mireille Baudon à Porto-Vecchio. Depuis 2001, il poursuit sa formation, notamment aux côtés de Robin Renucci, Anne Cornu et Vincent  Rouche, Noël Casale, René Jauneau et collabore régulièrement avec l’Aria. 

Si vous souhaitez l'écouter ( le pénitent et le dernier Corse)

https://qui-magazine.fr/podcasts-nouvelle-inedite/

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christian ruspini7

 

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Ami, cache ta vie et répands ton esprit.


Un tertre, où le gazon diversement fleurit ;
Des ravins où l'on voit grimper les chèvres blanches ;
Un vallon, abrité sous un réseau de branches
Pleines de nids d'oiseaux, de murmures, de voix,
Qu'un vent joyeux remue, et d'où tombe parfois,
Comme un sequin jeté par une main distraite,
Un rayon de soleil dans ton âme secrète ;

...

Calme et pure, à travers les âmes fécondées,
Un immense courant de rêves et d'idées,
Qui recueille en passant, dans son flot solennel,
Toute eau qui sort de terre ou qui descend du ciel !
Toi, sois heureux dans l'ombre. En ta vie ignorée,
Dans ta tranquillité vénérable et sacrée,
Reste réfugié, penseur mystérieux !
Et que le voyageur malade et sérieux
Puisse, si le hasard l'amène en ta retraite,
Puiser en toi la paix, l'espérance discrète,
L'oubli de la fatigue et l'oubli du danger,
Et boire à ton esprit limpide, sans songer
Que, là-bas, tout un peuple aux mêmes eaux s'abreuve.

Sois petit comme source et sois grand comme fleuve.

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- Victor Hugo

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Texte en français ci-dessous ... 

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 Ce pays-là n’est pas pour les vieillards. Les garçons

 Et les filles enlacés, les oiseaux dans les arbres

 – Ces générations de la mort – tout à leur chant,

 Les saumons bondissants, les mers combles de maquereaux,

 Tout ce qui marche, nage ou vole, au long de l’été célèbre

 Tout ce qui est engendré, naît et meurt.

 Ravis par cette musique sensuelle, tous négligent

 Les monuments de l’intellect qui ne vieillit pas.

 

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 Un homme d’âge n’est qu’une misérable chose,

 Un manteau loqueteux sur un bâton, à moins

 Que l’âme ne batte des mains et ne chante, et ne chante plus fort

 A chaque nouvelle déchirure qui troue son habit mortel,

 Mais il n’est qu’une seule école pour ce chant, c’est l’étude

 Des monuments de sa propre magnificence ;

 Et c’est pourquoi j’ai traversé les mers pour m’en venir

 Jusqu’à la cité sainte de Byzance.

 

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 Ô vous, sages dressés dans les saintes flammes de Dieu

 Comme dans l’or d’une mosaïque sur un mur,

 Sortez des flammes saintes, venez dans la gyre qui tournoie

 Et soyez les maîtres de chant de mon âme.

 Réduisez en cendres mon cœur ; malade de désir,

 Ligoté à un animal qui se meurt,

 Il ignore ce qu’il est ; et recueillez-moi

 Dans l’artifice de l’éternité.

 

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 Une fois hors de la nature, je n’emprunterai plus

 Ma forme corporelle à nulle chose naturelle, mais

 A ces formes que les orfèvres de Grèce

 Façonnent d’or battu ou couvrent de feuilles d’or

 Pour tenir en éveil un Empereur somnolent ;

 Ou qu’ils posent sur un rameau d’or pour qu’elles chantent

 Aux seigneurs et aux dames de Byzance

 Ce qui fut, ce qui est, ce qui est à venir.

 

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 "Sailing to byzantium" de William Butler Yeats

 Traduction en FrançaisJ.-Y. Masson,

 in, Anthologie bilingue de la poésie anglaise, La Pléiade, Gallimard, 2005

 Traduction en Corse Marc Biancarelli

 

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christian ruspini8,

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« J’écoute la mer, j’écoute le vent,

j’écoute les voiles qui parlent avec la pluie et les étoiles

dans les bruits de la mer et je n’ai pas sommeil.

Je pense à William Willis,

tout seul sur son radeau de balsa pendant des mois et des mois dans le Pacifique,

avec la mer à lui tout seul au milieu de l’univers.

Et parfois il entendait le “Chant” par toutes les fibres de son être.

Je l’entends aussi depuis quelques temps.

Et c’est peut-être ça, la longue route.

(…)

Le vrai journal est écrit dans la mer et dans le ciel,

on ne peut pas le photographier pour le donner aux autres.

Il est né peu à peu de tout ce qui nous entoure depuis des mois,

les bruits de l’eau sur la carène,

les bruits du vent qui glisse sur les voiles,

les silences pleins de choses secrètes entre mon bateau et moi,

comme lorsque j’écoutais parler la forêt quand j’étais gosse.

 

 ...

 

 Le sillage s'étire, blanc et dense de vie le jour,

lumineux la nuit comme une longue chevelure de rêve et d'étoiles.

L'eau court sur la carène et gronde ou chante ou bruisse,

selon le vent, selon le ciel, selon que le couchant était rouge ou gris.

Il est rouge depuis plusieurs jours et le vent chantonne dans le gréement,

fait battre une drisse parfois contre le mât,

passe comme une caresse sur les voiles et poursuit sa course vers l'ouest,

vers madère,

tandis que Joshua descend vers le sud à 7 nœuds dans l'Alizé

....

 

C'est toute la vie que je contemple,

le soleil, les nuages, la mer, le temps qui passe et reste là.

C'est aussi, parfois,

cet autre monde devenu étranger,

que j'ai quitté depuis des siècles.

Ce monde moderne artificiel

où l'homme a été transformé en machine à gagner de l'argent

pour assouvir de faux besoins, de fausses joies.

 

...

 

- Bernard Moitessier 

" La longue route "

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christian ruspini

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lundi 29 mai 2023

LAETITIA EXTREMET....Extrait

Si rien ne dure
ni le sel sous la peau
ni les instants du soir
ni la vague et mes petits bateaux,
si tout cela est impur
l’azur le sable et les châteaux
au point de se dissoudre
qu’il faut s’enfuir alors
laisser s’échouer les mots
absenter nos mémoires
et courir d’autres soifs,
Dis-moi
dis-moi alors qu’on partira ensemble
donne-moi encore un peu d’eau
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LAETITIA EXTREMET
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phil charpentier

Oeuvre Philippe Charpentier

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JEAN DIHARSCE...Extrait

Le temps qu'il faudra maintenant
pour remonter les mots
et qu'ils ne grincent plus
la mémoire est sans fond
nous saurons bien nous taire
les enfants sont partis avec leur farandole
les fêtes d'autrefois ont laissé des bouteilles
et la maison est vide
il n'y aura qu'à puiser
pour devenir
avant
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JEAN DIHARSCE
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nostalgie-douleur

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samedi 27 mai 2023

LES PAS DE L'EAU...Extrait


Je connais le bruissement de l’aile des cailles.
La couleur du plumage des outardes, les traces de la foulée des chevreuils.
Je sais bien où poussent les rhubarbes, quand vient l’étourneau,
Quand chante la perdrix, quand meurt le faucon.
Je sais comment se lève la lune dans le rêve du désert.
Je connais la présence de la mort dans la tige du désir,
Et le plaisir au goût de framboise que procure l’étreinte charnelle
La vie est somme toute une habitude agréable.
La vie a des ailes aussi vastes que la mort,
Un essor vertigineux comme l’amour.
La vie n’est pas cette chose que nous oublions, toi et moi,
L’ayant égarée naguère dans la niche de l’habitude.
La vie est cette main tendue qui s’apprête à cueillir
Les premières figues noires dans la bouche acre de l’été,
La vision qu’offre l’arbre aux yeux multiples des insectes,
La sensation étrange qu’éprouvent les oiseaux migrateurs,
Le sifflement d’un train qui vire dans le rêve d’un pont,


(…)

 

La vie est reflet multiplié par le miroir,
Fleur « à la puissance de l’éternité »,
Elle est : terre amplifiée par nos battements de cœur,
Géométrie simple et monotone de nos respirations.

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SOHRAB SEPHERI

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Olha Pilyuhina (artiste ukrainienne contemporaine)

 

Oeuvre Olha Pilyuhina 

Artiste Ukrainienne contemporaine 

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dimanche 21 mai 2023

JEAN DIHARSCE...Extrait

Pour une maison propre aux doigts tissés de brume
un espoir du matin
quand tout respire autrement
la poignée de l'entrée est restée dans les doigts
la résilience
ce que je dois au temps quand il s'est retourné
nulle trace de doigt sur la maie d'autrefois
ni de buée aux vitres
quand la porte est ouverte
entre hier et demain
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JEAN DIHARSCE
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Christian Charz Guillot2

Photographie Christian Charz Guillot

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samedi 20 mai 2023

THIERRY MATHIASIN...Extrait

Tu es revenue de si loin cueillir les rêves dont j'ai vieilli,
poser ton visage contre mes yeux qui ont tant vu,
que j'ai oublié de quoi étaient faites les images.
De quoi me reste t-il encore à mourir,
puisque tout ce que j'ai aimé me regarde maintenant comme un étranger ?
Surtout, ne secoue pas trop ma tête,
elle est habitée d'oiseaux qui pleurent mes désirs,
de ciels fissurés où ne respirent que mes pensées .
Tu m'a parlé de tant de suicidés
que j'ai maudit les hauteurs et leur promontoire d'inexcusables prophéties.
Je voyais par le sang jailli de mes cris,
tout le désastre où s'abîme la folie des êtres,
les stigmates et les splendeurs des vies cherchant leur souffle.
De quelle femme descendue des vagues
dois-je encore repriser mes rives pour libérer le soleil d'une ultime écume ?
Tu m'a arraché des ombres où je peaufinais mes guerres,
mes tranchées de sève belliqueuse
quêtant la foi de ceux qui n'ont plus rien à perdre
Je me suis perdu à faire le compte des amours
d'où l'on ne sort jamais indemne,
à me souvenir des tendresses dont personne ne m'a guéri.
De quelle mémoire les cariatides ont soulagé mes errances,
porté au plus fort de l'orage mes joies d'enfant et sa poussière de ciel ?
Tu a tracé dans mon dédale de racines,
une rivière pour jouir des jours que promettaient les saisons,
effacer tous les chemins tortueux
où mon étoile s'est blessée de ne pas être à sa place
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THIERRY MATHIASIN
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Olha Pilyuhina (artiste ukrainienne contemporaine)

Oeuvre tapisserie Olha Pilyuhina

Artiste ukrainienne contempraine

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vendredi 19 mai 2023

DU TEMPS....Extrait

Dans l’eau du temps qui coule à petit bruit,
Dans l’air du temps qui souffle à petit vent,
Dans l’eau du temps qui parle à petits mots
Et sourdement touche l’herbe et le sable ;
Dans l’eau du temps qui traverse les marbres,
Usant au front le rêve des statues,
Dans l’eau du temps qui muse au lourd jardin,
Le vent du temps qui fuse au lourd feuillage
Dans l’air du temps qui ruse aux quatre vents,
Et qui jamais ne pose son envol,
Dans l’air du temps qui pousse un hurlement
Puis va baiser les flores de la vague,
Dans l’eau du temps qui retourne à la mer,
Dans l’air du temps qui n’a point de maison,
Dans l’eau, dans l’air, dans la changeante humeur
Du temps, du temps sans heure et sans visage,
J’aurai vécu à profonde saveur,
Cherchant un peu de terre sous mes pieds,
J’aurai vécu à profondes gorgées,
Buvant le temps, buvant tout l’air du temps
Et tout le vin qui coule dans le temps.
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GEO NORGE
Œuvres poétiques, Paris, Séghers, 1978.
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Olha Pilyuhina (artiste ukrainienne contemporaine)

Oeuvre tapisserie Olha Pilyuhina

Artiste ukrainienne contemporaine

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mardi 16 mai 2023

LE DOCTEUR JIVAGO....Extrait

« Oh, comme parfois on aimerait laisser le sublime, les ténèbres épaisses du bavardage humain, pour se réfugier dans l'apparent silence de la nature, dans le bagne muet d'un long travail obstiné, dans l'ineffable du sommeil profond, de la vraie musique et du calme langage des cœurs, qui fait taire l'âme comblée. »
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BORIS PASTERNAK
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pasternak

lundi 15 mai 2023

BLEU

 

Commencer par le bleu car c’est notre origine. C’est nous, c’est moi. Bleu c’est et le ciel et l’eau, c’est l’eau parce que le ciel et au-delà du bleu, il n’y a plus que de la nuit.

Bleu est un absolu. Si on recherche la pureté, on peut commettre l’erreur du blanc mais droit devant, plus forte, plus attirante encore est la densité du bleu.

À la racine, il y a l’outremer. La pompe animale qu’enserre ma poitrine envoie jusqu’aux extrêmes de mon corps de l’outremer avec la puissance d’une marée et comme elle, c’est inlassable. La couleur ne tarit pas. Elle n’est que force. Seule s’épuise lentement l’énergie et le mouvement.

Outremer, c’est aussi cette trace marine dans le bleu au sortir des nuits abyssales. Quelque chose venu d’ailleurs, hors du champ déterminé du bleu. C’est au-delà de la couleur mais tout est là, varech, limon, puissance décomposée des roches, l’odeur du sel aussi et, sur la palette du monde, l’alchimie de la première eau prend nom, forme et densité.

On sculpte l’outremer. On pétrit par la main et l’esprit bien plus que la de pâte-couleur. Le meilleur de l’humain est teinté de mer sans fond par temps d’été, brûlure et froidure. Un peuple tout entier chante en lui, roulé par les courants des profondeurs. Dans les fleuves masqués des fonds sans lumière coule une vie inéluctable, une vie d’avant la vie.

Être fidèle. On en revient à cela. Le bleu sans fin m’appelle tant que reste un souffle de vie en moi. Dans la détresse aride du désert, dans l’épuisement des sentiers de montagne, loin au dessus du monde, sous le couvert moite des terres végétales, je m’abîme dans l’intensité du bleu, je prie une divinité qui n’a ni visage ni contours mais qui répand son azur entre chaque cellule vivante. Un pas après l’autre, j’avance et puise à la une pile indigo qui m’anime, jusqu’au plus haut, jusqu’au plus loin.

Revenir des profondeurs, c’est répondre à l’appel d’un bleu toujours plus transparent. Les colosses océaniques le savent, eux qui explorent les eaux de leur chant limpide, et sans cesse nous venons, comme eux happer cette goulée de lumière, cet azur crevé de soleil, quand le morne menace de nous engloutir.

Il n’y a pas de mensonge possible. Le bleu est dans le regard. Il ignore l’iris de l’œil et traverse la vision, jusqu’au revers des apparences.

 

Même loin de toute couleur, même dans le plus obscur des enfers, il reste une touche de cœur et, à n’en pas douter, elle est bleue.

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 LEILA ZHOUR

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leila

 

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jeudi 4 mai 2023

JOHN LEE HOOCKER - MABEL

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