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EMMILA GITANA
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6 juin 2022

POTEAUX D'ANGLE...Extrait

N'apprends qu'avec réserve. Toute une vie ne suffit pas pour désapprendre, ce que naïf, soumis, tu t'es laissé mettre dans la tête – innocent - sans songer aux conséquences.
Dans une époque d'agités, garde ton andante. En toi-même redis-toi toujours : « Davantage, davantage d’andante », tâchant de t'amener où il faut que tu arrives. Sinon, précipité, tout devient superficiel. Les indignés du moment n'y échappent guère.
Avec tes défauts pas de hâte. Ne va pas à la légère les corriger. Qu'irais-tu mettre à la place ?
Ne laisse personne choisir ton bouc-émissaire. C'est ton affaire. S'il coïncide avec le bouc émissaire d'un autre ou de dizaines d'autres ou davantage, change de bouc. Il ne peut être le tien.
A quel homme donner le titre de parfait massacreur des pères ? Ne va pas donner ta voix à tel ou tel célèbre faiseur de système en qui le grand nombre a vu un libérateur. Ils aiment tellement être entraînés. Ils attendaient de l'être.
Garde intacte ta faiblesse. Ne cherche pas à acquérir des forces, de celles surtout qui ne sont pour toi, qui ne te sont pas destinées, dont la nature te préservait, te préparant à autre chose.
Ce que tu as gâché, ce que tu as laissé se gâcher et qui te gêne et te préoccupe, ton échec, est pourtant cela même, qui ne dormant pas, est énergie, énergie surtout. Qu'en fais-tu ?
Tu peux être tranquille. Il reste du limpide en toi. En une seule vie, tu n'as pas pu tout souiller.
Souviens-toi. Celui qui acquiert, chaque fois qu'il acquiert, perd.
Si affaissé, brimé, si fini que tu sois, demande-toi régulièrement - et irrégulièrement - "Qu'est-ce qu'aujourd'hui encore je peux risquer ?"
Non, non, pas acquérir. Voyager pour t'appauvrir. Voilà ce dont tu as besoin.
Les arbres frissonnent plus finement, plus amplement, plus souplement, plus gracieusement, plus infiniment qu'homme ou femme sur cette terre et soulagent davantage.
Les peurs, les appréhensions, les soucis, la mélancolie, les tendresses, les émotions inexprimables, les arbres, pourvu qu'il y ait un souffle de vent, savent les accompagner.
Toute pensée, après peu de temps, arrête. Pense pour échapper d’abord à leurs pensées-culs-de-sac, ensuite à tes pensées-culs-de-sac.
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HENRI MICHAUX
(1899-1984)
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juan-pablo-rodriguez2

 Photographie Juan Pablo Rodriguez

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