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EMMILA GITANA
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15 juin 2011

MADRID

Cette ride sinistre de la Sierra et l'horizon cerné d'un orage de fer:

le ciel n'a plus un sourire plus un seul tesson d'azur

pas un arc à lancer l'espoir d'une flèche de soleil

les arbres déchiquetés se redressent gémissent comme des violons désacordés

tout un village endormi dans la mort s'en va à la dérive

quand la mitrailleuse crible la passoire du silence

quand explose la cataracte de fracas

que le plâtras du ciel s'écroule

Et les flammes tordues lèchent dans la cité

les blessures des lézardes calfatées de nuit

et dans le petit square abandonné où règne maintenant la paisible épouvante il y a

mais oui il y a  sur le visage sanglant de cet enfant

un sourire

comme une grenade écrasée à coups de talon

 

 

Plus d'oiseaux de doux chant d'oiseau des collines

l'âge de feu et d'acier est né la saison des sauterelles apocalyptiques

et les tanks avancent l'invasion obstinée de gros hannetons ravageurs

et l'homme est terré avec sa haine et sa joie pour demain

et quand il s'élance

la mort te vendange Hans Beimler

la mort qui agite sur le van de la plaine

une moisson de cris

Voici avec la neige la denture cariée des montagnes

l'essaim des balles bourdonnant sur la charogne de la terre

et la peur au fond des entonnoirs est comme le ver dans une pustule crevée

Qui se rappelle l'incroyable saison le miel des vergers et le sentier sous les branches

le murmure froissé des feuilles et le rire tendre et bon de la jeune femme

la paix du ciel et le secret des eaux -

Il y a longtemps que tomba dans l'oliveraie Lina Odena là-bas dans le sud

 

C'est ici l'espace menacé du destin

la grève où

accourue de l'Atlas et du Rhin

la vague confondue de la fraternité du crime

déferle

sur

l'espoir traqué des hommes

Mais c'est aussi malgré les scré-coeurs brodés sur l'étendard de Mahomet

les scapulaires les reliques

les grigris du lucre

les fétiches du meurtre

les totems de l'ignorance

tous le vêtements du mensonge les signes déméntiels du passé

ICI l'aube s'arrache des lambeaux de la nuit

que dans l'atroce parturition et l'humble sang anonyme du paysan et de l'ouvrier

naît le monde où sera effacée du front des hommes

la flétrissure amère de la seule égalité du désespoir

.

JACQUES ROUMAIN

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manolo_millares

Oeuvre Manuel Millares

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