A Cristina Castello et André Chenet
Lavandes lumineuses dans le vertige de vivre
Lavandes I
Alors on te pressait dans un nuage de brumes, et le nuage était un soleil blanc,
et les essences de ton être, grandes lignes de silence, dansaient dans le soleil tremblant
Lavandes! douceur fraîche des sachets bleus entre les draps de lin
Douceur extrême posée sur la baptiste des mouchoirs,
ciel profond d'oliviers trop vastes pour l'or du couchant.
Ils rêvaient de ce pacte indicible qu'un peintre inventa un soir d'allégresse
et les lavandes hautes dansaient entre deux astres,
inventaient les traits sombres et la terre traversés de printemps
quel soleil inaugurait la vague à l'est des lignes courbes?
Lavandes! un royaume d'abeilles en distillait le miel
alors se levait un gout de sucre rare, grave comme la bouche de femmes taciturnes
fragiles ombres évadées des paupières
se souvenant de temps heureux.
Lavandes II
Grand deuil de femme,
les années disparues
Éclats fabuleux. Clair de terre
Sur leurs hautes tiges mauves
elles appelaient la lune
comme les bergères de ce cri d'oiseau de nuit
Belles et tendres comme des libellules
Évanescentes ailes entre deux murets de pierre sèche - si près de la mort -
on sentait vaciller les paupières au battement d'élytres
le soleil courbait la ligne du ciel.
la lumière chantait près des ruchers
frisson d'oiseaux dans l'air de glace transparente le soir.
Je me souviens du vent,
je me souviens du vent traversant les collines, des larmes vives au coin des yeux
Amour déçu d'une infante
quel jardinier lui rendrait ses jardins de Grenade, ses rêves de pirogues enjambant le destin?
Je ne sais plus si le vent arrêtait ses larmes
si l'eau de son sourire abreuvait la nuit.
tandis que le monde vacille entre ses extrêmes
des eaux lentes du soir au lait des galaxies
qui réchauffera le cœur noir de l'infante?
Lavandes III
Dans les lavandes toutes sortes de plantes et le silence du matin.
on t'appelle. Viendras-tu?
Renoue à ta source d'enfance
Lentes plantes humaines
aux croissances incertaines
où tout n'est que rêve et tremplin de lumière
Tendre l'ombre jusqu'aux lisières du rêve
Pouvoir voler le feu
Sans que le malheur en assèche la flamme
Et l'onde remuait entre les galets
soulevait un nuage de cendres
et la tristesse des loups que la peur tenaille.
Crois encore aux songes, à ce drap de lin bleu tendu entre les âges
aux eaux vives du torrent bordé de violettes
Traversées d'hiver dans le puits des enfermements
il te faudra renaitre par le soudain éloge du soleil par le ciel bleu
Lavandes!
Sans nuage est la nuit étoilée.
Lavandes IV
Il te souvient de ces pleurs au matin des grands bans de tristesse
des nuits trop longues d'insomnie dans l'exil des jours
de l'effroi, de la peur, du silence résistant à l'appel.
Et ce regard de fièvre lente de la mort.
Pleure! pleure au creux des vieilles pierres
entre les bras de l'aïeule
pleure!
nul secours ne viendra des racines mais des galets cueillis au fond du lit
.
.
Lente et pâle tu te lèves, il faudra du courage, tu mettras un grand chapeau de soleil
pour abriter ton rêve,
tu ouvriras grandes les portes de ton exil
pour que les rayons en assèchent le seuil
tu inonderas la pluie venue de l'ouest avec les larmes de la nuit
Tièdes larmes de la douleur du monde que tu ne peux porter seule
et voilà à ta bouche la douceur de l'amante, le suc des fleurs en pleine lumière
Midi. la vie sera belle si tu lèves la fleur noire qui couvre tes paupières
à l'ombre des persiennes.
Lavandes V
Il n'y a pas lieu de prier le front entre les mains absentes
Te souviens-tu des heures nocturnes quand dérive le monde entre tes mains?
Te souviens-tu des heures d'aube grise où tu résistes à la nuit?
Midi sans ombre t'appelle
Il n'y a pas lieu de prier le front entre tes mains
Va sur les quais oublier l'exil des grands voiliers
où échoue la misère des peuples.
Midi des lavandes encore
la terre ferme retient la mer hantée d'illisibles départs
Midi des lavandes toujours
au parfum entêtant des jasmins
Midi ouvert contre les plus vastes crimes
Midi au souffle de ton âge de naître vive
par la seule tendresse au jardin du poème
il y a lieu de prier l'abondante saison d'aimer.
Lavandes VI
Lavandes!
sur la haute garrigue veille la flamme bleue des étoiles naines
la voix de blanche lune marche sur l'eau nue.
Les loups se taisent de tristesse, tenaillés par la peur
Torches vives, les lavandes endurent la flamme du rêve étoilé et la solitude des loups.
Épilogues
Quelques mots blessent la mer
au lait bleu des vagues
Brise lisse du temps
le sang bat dans l'orbe des galets
aux cœurs de pierre
donne la source
Pleurerait la colline
au port des grâces
sur le front des vagues
se drape le soleil
dans sa discrète houle
de sang.
Frotte le galet
jusqu'à faire luire la jeunesse de la mer.
l'irritation des vagues
accuse la lumière
la force de l'écume berce le cri désespéré
la langue étrangère de la mer se comprend au murmure des vagues
désormais cette plage que plus rien n'inspire
le jeu solitaire de la baigneuse entre les pages de magazine
l'homme au pas chancelant dérange les galets
Ah cette fraicheur d'eau sur les tempes
avant que le sel n'en blanchisse les bords
rive grise - insolence du temps
Attendre que la vague t'emporte de l'autre côté de son flanc
quelque chose de rude s'éprend du silence, te brise jusqu'à te rejeter débris de sable.
Lumière - tôle renversée où se plissent les vagues
oiseau- essor blanc où chante le zénith
arbre- tronc échoué, seul rescapé de la houle
avance entre deux hivers
dans le sillage de l'hirondelle.
Attendre que la vague t'emporte de l'autre côté de son flanc
quelque chose de rude s'éprend du silence, te brise jusqu'à te rejeter débris de sable.
Lumière - tôle renversée où se plissent les vagues
oiseau- essor blanc où chante le zénith
arbre- tronc échoué, seul rescapé de la houle
avance entre deux hivers
dans le sillage de l'hirondelle.
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NICOLE BARRIERE
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